Polémique « dipin legim » : entre dérives journalistiques et ingratitude citoyenne

Journalistes, citoyens, politiciens et opposants au gouvernement ont sauté à pieds joints sur la polémique « dipin légim ». Pour beaucoup sans vérifier leurs informations.
Polémique « dipin legim » : entre dérives journalistiques et ingratitude citoyenne

Donc, dans ce pays, manger du « brinzel » et du « margoz » relèverait d’une insulte ? Depuis que certains jeunes participants au record du monde du plus grand drapeau national humain se sont laissés aller mardi à des commentaires négatifs sur les réseaux sociaux, mélangeant insultes et propos ingrats envers la nourriture qu’ils auraient reçue lors de leur déplacement au stade Anjalay, la polémique, un de nos sports nationaux, enfle. Journalistes, citoyens, politiciens et opposants au gouvernement ont sauté à pieds joints sur la polémique « dipin légim ». Pour beaucoup sans vérifier leurs informations. Ce matin, l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice a sorti un communiqué sur ce sujet, expliquant les coulisses de la distribution de nourriture d’hier.

Déjà, on doit dire un grand bravo aux 34 hôtels qui ont gracieusement et gratuitement offert plus de 8 000 packs déjeuner aux milliers de collégiens qui ont participé à l’événement de mardi. Merci à ces centaines de cuisiniers qui se sont mis au travail très tôt le matin pour que ces repas soient livrés à temps. Le directeur de l’AHRIM précise que les organisateurs ont retenu la proposition d’un pain végétarien, d’un fruit et d’un gâteau sec dans chaque pack.

Là où la polémique fait rage, c’est qu’un ou quelques collégiens se sont offusqués sur les réseaux sociaux de s’être vu offert un « dipin brinzel » ou un « dipin margoz ». Le tout accompagnés d’insultes et autres mots grossiers. Et comme un seul homme, « nos valeureux soldats des réseaux sociaux », certains titres de presse, des politiciens qui cherchaient un os à ronger, entre autres, se sont emparés de cette polémique pour dénigrer pêle-mêle le gouvernement, le Premier ministre, les organisateurs, « ceux qui ont eu de juteux contrats », « les emballages dans du papier journal », et le repas en question. 

Après la parution du communiqué de l’AHRIM, on peut noter ceci : certains journalistes donneurs de leçons devraient faire leur homework avant d’écrire n’importe quoi. Ces mêmes journalistes hurlent au non-respect de l’éthique à la moindre chose qui leur déplait.

Où est leur éthique après avoir parlé de « juteux contrats » ou d’emballage dans « du papier journal » quand on apprend que ces repas étaient offerts gratuitement par des hôtels et que c’était des emballages alimentaires avec des imprimés « effets papier journal » comme utilisés dans des bistrots ou autres fast-food ? Où se trouve leur responsabilité médiatique ? C’est facile d’allumer un feu mais c’est autre chose que de l’éteindre. 

Autre point qu’il faut souligner : depuis quand manger un pain avec des légumes, grillés ou pas, serait une insulte à la personne qui le reçoit ? Ce pain était-il impropre à la consommation ? NON. On peut comprendre le choix d’harmonisation du contenu de ces pains, entre le végétarien et le non-végétarien. Ce pain était mangeable. A Maurice, des milliers de personnes mangent du pain « margoz » ou du pain « brinzel », grillé ou pas, tous les jours. Sans faire du chichi. Des générations de Mauriciens en ont mangé. 

RESPONSABILITÉ ET RECONNAISSANCE

Ces pains, dont certains avaient paraît-il une préparation à base de sauce pesto et de légumes grillés, étaient mangeables. D’autres collégiens en ont mangé, sans polémiques. Pourquoi monter les insultes et dénigrements d’une poignée d’élèves en épingle tout en occultant la voix de ceux qui étaient satisfaits de ce même repas ? N’aurait-on pas dû plutôt chercher à responsabiliser nos jeunes envers la nation, envers le drapeau, envers la patrie ? Où se trouve la reconnaissance envers le pays ? C’est ce genre d’attitude et de propos irresponsables que des parents encouragent chez leur progéniture ? 

On peut comprendre que les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas. Ceux qui n’étaient pas satisfaits du repas reçu auraient pu l’échanger avec leurs camarades, contre quelque chose de plus appétissant à leurs yeux. Parce qu’il serait difficile de croire que PERSONNE parmi les plus de 6 000 élèves présents hier au stade Anjalay n’avait apporté un en-cas fait maison ! Ce n’est pas parce qu’on est jeune qu’on doit être exempt de tout reproche. Certains de nos collégiens doivent revoir leur manière de se comporter en public. La place publique n’est pas un lieu pour se comporter comme des voyous ou des malotrus. Si c’est cette jeunesse-là l’avenir du pays, Maurice a du souci à se faire !

Terminons sur ces politiciens qui se sont engouffrés dans la polémique. Certains ont-ils oublié le triste épisode des repas chauds contaminés de l’école Bambous A en février 2013 ? Plus d’une centaine de petits écoliers avaient été victimes d’intoxication alimentaire après avoir consommé le repas chaud qu’ils recevaient tous les jours. Ces mêmes politiciens et autres donneurs de leçons auraient-ils préféré que les enfants présents au stade Anjalay mardi reçoivent un « take-away » de riz frit, de mines frits ou de briani, avec tous les risques d’intoxication alimentaire que cela pouvait entraîner ? 

La polémique de mardi relève d’une question de goût. On ne peut plaire à tout le monde. On peut aussi ne pas aimer quelque chose. C’est un droit. Mais il y a une manière courtoise de le faire savoir. Il serait temps d’arrêter de tout vouloir ramener à notre petite personne. Ces 6 145 enfants ont fait la fierté de Maurice, mardi. Ils ont apporté leur pierre à l’édification de la nation mauricienne. Saluons plutôt leur patriotisme et leur amour du pays.

Sunil Gohin

CEO de Wazaa FM et d’Inside News

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